La Chine et le Japon sont les deux principales puissances de l’Asie orientale pour autant ces puissances ne sont pas équivalentes. Le Japon est une puissance économique et technique bien établie alors que la puissance économique chinoise est beaucoup plus récente et repose plus sur l’importance de la main-d’œuvre (bien qu’elle se développe rapidement).
Leur influence régionale prend des formes différentes : le statut du Japon reste essentiellement celui d’une puissance économique (malgré les importants efforts militaires accomplis ces dernières années), alors que la Chine, puissance ancienne, revendique un poids politique à la hauteur de son poids démographique et de sa réussite économique.
Malgré une interdépendance économique entre les deux pays, les relations sino japonaises sont traversées par des rivalités parfois anciennes. Le souvenir des guerres, de l’occupation japonaise (1931-1940) et les contentieux notamment maritimes alimentent régulièrement les tensions.
A l’échelle mondiale, les enjeux sont à peu près comparables. Ces deux puissances ont besoin du reste du monde pour s’affirmer et elles se révèlent là encore rivales, même si leurs atouts et leurs objectifs sont différents. Alors que le Japon cherche à conforter ses positions, la Chine, «nouvelle venue», cherche à être toujours plus influente pour s’affirmer comme la principale rivale des EU.
Problématique : En quoi les puissances japonaise et chinoise sont-elles concurrentes en Asie orientale et dans le monde?
I – DES CONCURRENCES REGIONALES
A°) Deux puissances asiatiques face à face
- Des territoires et des ressources différents
Avec respectivement 9,6 millions de km² et 348 000 km², les territoires de la Chine et du Japon ne sont pas comparables.
La Chine se situe au 4° rang mondial pour la superficie, est un territoire d’un seul tenant, alors que le Japon est un archipel composé de 4 îles principales et 430 petites îles habités. Son territoire est à la fois modeste et morcelé, mais lui apporte une ZEE importante.
Les ressources de ces pays sont d’autre part différentes. La Chine dispose de ressources importantes : 1° producteur mondial d’or, de fer, de charbon, 5° pour le pétrole; 1° producteur d’hydroélectricité, de panneaux photovoltaïques et d’énergie solaire, 3° producteur d’éthanol.
Alors que le Japon est faiblement doté en ressources naturelles et dépend de l’extérieur pour les matières premières.
- Des éléments communs de civilisation
La Chine a été le foyer de la civilisation de l’Asie orientale. La civilisation chinoise est l’une des plus anciennes au monde. Elle a inventé un système d’écriture, un modèle politique, des conceptions morales et intellectuelles (confucianisme), qu’elle a ensuite diffusés vers ses voisins.
Confucianisme : doctrine élaborée par Kongfuzi, «Maître Kong», – 551 – 479, Confucius pour les Occidentaux, doctrine d’État en Chine du II°s avant notre ère jusqu’à la fondation de la République de Chine en 1911.La finalité de la morale confucéenne est la noblesse spirituelle, dont le concept central est la bienveillance, qui se base sur la moralité. Cette doctrine prône le respect de la hiérarchie, la tolérance le pardon , la fidélité, le dépassement et le contrôle de soi…
Au VIème siècle, le bouddhisme arrive au Japon depuis la Chine et la Corée et bouleverse la vie politique en place. Une constitution bouddhique est rédigée pour encadrer le fonctionnement de l’Etat. Très influencé par la culture chinoise et coréenne jusqu’au IXème siècle, le Japon s’en émancipe à partir du Xème siècle. La politique est divisée entre le pour voir impérial et les chefs de clans. Le Japon pratique une politique d’isolement à partir de 1635 (Edit Sakoku)
Au XIXème siècle le retour du pouvoir impérial au centre du système politique constitue l’acte de naissance de l’Empire du Japon. En compétition avec le colonialisme occidental sur le continent asiatique, le pays se lance dans une politique d’expansion territoriale, qui aboutit à l’annexion de la Corée en 1910, l’invasion de la Mandchourie en 1931, et l’occupation de la Chine en 37 (voir infra)
Au début des années 1940, le pays s’engage auprès de l’Axe. Le conflit prend fin après les bombardements atomiques d’Hiroshima et Nagasaki d’août 1945 ; l’Empire du Japon est contraint à la capitulation. De 1945 à 1952, l’occupant américain impose la démocratisation du pays.
- Les rapports mémoriels entre le Japon et la Chine
La 1°guerre sino-japonaise de 1894-1895 (qui a abouti à la défaite chinoise de 1895 et au traité de Shimonoseki où Pékin a dû reconnaître l’indépendance de la Corée et céder différentes îles au Japon dont la future Taiwan), l’invasion de la Chine en 1937, marquée notamment par l’occupation de ses principales villes et régions côtières, par le massacre de populations civiles chinoises à Nankin (alors capitale du pays et où 300 000 personnes ont été massacrées), ont laissé de lourdes séquelles.
La Chine demande régulièrement des excuses que le Japon a pourtant exprimées par écrit en 1972 lors de la normalisation diplomatique entre les 2 pays, puis réitérées oralement à plusieurs reprises, en les élargissant même à l’ensemble de l’Asie en 1995 et en 2005. Cependant, cette parole entre en contradiction avec les visites régulières des ministres et parlementaires japonais au sanctuaire Yasukuni (fondé à Tokyo en 1869 par l’empereur Meiji, le sanctuaire rend un culte et «déifie» 2,5 millions de Japonais tombés au combat, dont 14 criminels de guerre condamnés par les Alliés après la défaite de 1945. (Shinzo Abe actuel PM s’y est rendu en 2013)
- Après la 2° Guerre mondiale, le contexte géopolitique oppose les 2 pays:
➢ Après la fin de l’occupation, le Japon devient l’une des principales puissances économiques mondiales. Malgré l’opposition récurrente de ses proches voisins, son essor économique lui permet de diffuser dans le monde entier ses productions culturelles, substituant un soft power important à sa domination militaire passée.n pays vaincu, le Japon, appartenant au monde de l’économie libérale, protégé et occupé par les EU
➢ et un pays communiste, la Chine. Mais après la période du maoïsme autarcique, la Chine s’ouvre à son tour par la politique de Deng Xiaoping à partir de 1978
Pour les 2 pays, les bases de l’ouverture économique se fondent sur des politiques d’exportations : économie libérale à capitalisme d’État puissant au Japon, ouverture progressive des ZES littorales et mise en place d’une économie socialiste de marché en Chine.
B°) Deux économies de premier plan
- Le Japon, entre crise et renouveau:
Le développement économique japonais, amorcé au cours de l’ère Meiji (1868-1912: période durant laquelle est appliquée au Japon une politique de modernisation et d’ouverture économique dont l’objectif est de rattraper le retard économique accumulé par rapport à l’Occident), s’accélère après la 2° Guerre mondiale.
De 1955 à la fin des années 1980, le Japon connaît une phase de «Haute croissance» (taux moyen annuel de croissance économique de 9,7% et PIB X 5), stimulée par l’État qui oriente les stratégies des grandes firmes industrielles et commerciales. A cela, s’ajoutent des taux d’épargne élevés, favorables à l’investissement et une priorité accordée à l’instruction et aux technologies.
Les années 1990 marquent un fort ralentissement économique et surtout une remise en cause du modèle japonais basé sur l’emploi à vie et le compromis social. La précarité et le chômage font leur apparition dans un contexte de crise démographique (très faible croissance et population vieillissante). Il émerge de cette décennie l’idée très discutée d’un déclin du Japon.
Le Japon conserve cependant une base industrielle compétitive: il reste le 2° producteur mondial d’acier, le 2°producteur mondial d’automobiles… Le maintien d’importants investissements publics et privés dans la RD (recherche et développement) permet une montée en gamme constante des productions et une forte spécialisation du pays dans les technologies de pointe.
- La montée en puissance de la Chine
La Chine connaît une remarquable phase de développement économique et social depuis plus de 3 décennies. Elle a fondé sa réussite sur une production à bas coût, grâce à des exonérations fiscales (ZES) et à la présence d’une main-d’œuvre nombreuse et bon marché.
Elle est devenue depuis les années 1990, une plate-forme de productions manufacturées (pays atelier cad, pays où prédominent, d’une part, la fabrication de pièces détachées ou l’assemblage de composants élaborés ailleurs, d’autre part des industries de faible technologie. Son avantage vient du faible coût de la main-d’œuvre) fournissant une bonne part de la consommation mondiale.
La crise économique et financière mondiale de 2008 a cependant souligné la dépendance du pays à l’égard du marché mondial et les limites d’un modèle privilégiant l’attrait des IDE et le développement des exportations.
La redéfinition du modèle de développement chinois passe également par la stimulation de la demande intérieure et par une montée en gamme de la production soutenue par des investissements plus importants en RD. La Chine doit également réduire ses inégalités socio-spatiales et prendre en compte la question du DD.
C°) Des États à la fois partenaires et concurrents
- Des États à la fois partenaires et concurrents en Asie :
= > De nombreuses interdépendances « La croissance chinoise nourrit la croissance japonaise : plus la Chine s’enrichit, plus les échanges avec le Japon s’intensifient, en faveur… du Japon. » Rémi Scoccimarro, géographe spécialisé dans l’aire asiatique (citation à utiliser dans une copie éventuellement pour la nuancer) Le Japon considère depuis longtemps la Chine comme un « pays atelier » mais aussi comme un potentiel de clients car elle dispose d’une très nombreuse population dans laquelle est apparue une classe moyenne importante qui consomme des produits importés venant du Japon, notamment des produits haut de gamme. Donc les exportations japonaises progressent en Chine.
Le Japon fournit des biens intermédiaires (composants électroniques) et d’équipement (machines-outils) et importe des produits de moindre valeur ajoutée (textile, électronique grand public) souvent fabriqués par des entreprises et des capitaux japonais qui se sont délocalisés car le Japon est le 1er investisseur étranger en Chine, près de 20 000 entreprises japonaises sont présentes en Chine (14.4 % des IDE Japonais).
Entre 2000 et 2010, les exportations chinoises vers le Japon ont été X3, tandis que les importations japonaises en Chine ont été X4. Ainsi depuis 2009 la Chine est devenue le 1er partenaire commercial du Japon et représente environ 20% de ses échanges extérieurs. Le Japon est quant à lui, le 3ème client. Les flux de personnes s’intensifient aussi : environ 500 000 Chinois sont installés au Japon, surtout des étudiants et des expatriés de grandes firmes, et 127 000 Japonais vivent en Chine.
Ainsi pour faciliter leurs échanges commerciaux, les deux pays ont signé un accord pour utiliser leurs monnaies respectives à la place du dollar en 2011. Les 2 pays se sont d’autre part entendus dans la 2° moitié des années 1990 pour établir une zone de pêche commune. Ils ont également mis en place une coopération dans l’exploitation de gisements d’hydrocarbures offshore, accompagnée de la signature d’un accord en 2008. Mais malgré ces signes de coopération, Chine et Japon se livrent à une rivalité de puissance en Asie.
- Des rivalités économiques et financières :
Le Japon et la Chine se disputent le leadership économique en Asie du Sud et de l’Est, alors même que les deux économies sont interdépendantes.
Le Japon a un poids financier non négligeable: le surplus d’épargne, notamment des ménages, lui a permis d’accumuler un important patrimoine à l’étranger au point de devenir le 1° créancier de l’Asie du Sud et de l’Est. Sa suprématie est aussi technologique : le Japon est devenu une économie de la connaissance axée sur une recherche et une innovation permanentes. Il est le pays déposant le plus de brevets, en particulier dans les industries de pointe (télécommunication, robotique et biotechnologies).
Mais la Chine entend s’imposer comme le leader économique dans la région. En 30 ans, elle a comblé son retard en s’ouvrant aux échanges commerciaux et aux investissements étrangers qui lui ont permis de devenir « l’atelier du monde», notamment celui de l’Asie.
Elle ambitionne de détrôner le Japon sur le plan technologique et de devenir le «laboratoire du monde». Elle présente de fortes ambitions dans le domaine de la recherche: entre 1955 et 2007 le nombre de chercheurs chinois a plus que doublé. Avec 25% du total mondial de chercheurs, la Chine est aujourd’hui devant les EU et l’UE. Lepoids démographique entre ici en jeu…
Elle est le premier pays récepteur des IDE, mais aussi de plus en plus émetteur: 75% des IDE chinois vont vers l’Asie (25% pour le Japon). Elle renforce son poids en Asie, pratiquant «une diplomatie financière» mais elle fonde encore largement sa croissance sur sa fonction de «pays-atelier»
La récente croissance des investissements chinois au Japon suscite craintes et débats, ce qui explique la lenteur des discussions sino-japonaises pour un accord de libre-échange, alors que les deux pays en ont déjà signé avec plusieurs autres pays asiatiques.
- Une rivalité de puissance en Asie:
Dans le Japon de Shinzo Abe et la Chine de Xi Jinping, les courants nationalistes sont montés en puissance
Dans le cas chinois, le nationalisme se rattache à un sentiment de fierté nationale retrouvé, après un siècle et demi d’humiliations perpétrées par les puissances occidentales, mais aussi le Japon. La croissance économique et le fait que la Chine soit à nouveau dans le cercle des grandes puissances a ainsi nourri un sentiment de fierté que les responsables politiques ont su habilement mettre à profit, mais qui n’est pas tant une construction politique qu’un phénomène à très grande échelle, guidé par la volonté de tourner la page d’une histoire douloureuse. => pour affaiblir l’influence diplomatique du Japon, les autorités chinoises se servent des sentiments anti-japonais enracinés dans la société et qui s’expriment parfois de façon assez virulente.
Côté japonais, c’est la Seconde guerre mondiale qui, depuis la défaite (la première de son histoire) de 1945, alimente le pacifisme japonais, mais aussi à l’autre bout du spectre une tentation nationaliste articulée autour d’un négationnisme des crimes de guerre de l’armée impériale, et plus encore le fait que cette guerre a été perdue par l’utilisation brutale par les Etats-Unis d’un engin techniquement révolutionnaire, la bombe atomique. S’ajoute à cela, et en s’appuyant sur les mêmes référents, un sentiment empreint d’un profond pessimisme sur l’avenir de ce pays (démographie en baisse, stagnation de l’économie, catastrophes naturelles, non-renouvellement des élites politiques…). => L’émergence d’une Chine entre les mains d’un pouvoir autoritaire et nationaliste nourrit la crainte au Japon d’une «menace chinoise» et favorise le resserrement de son alliance avec les EU.
La permanence de différends entre les 2 pays souligne non seulement l’opposition de 2 nationalismes forts, mais aussi l’expression d’une rivalité de puissance en Asie. Les 2 pays ne semblent pas prêts pour le moment à collaborer pleinement dans la construction d’une coopération régionale à l’échelle de l’Asie.
- Une vision de la régionalisation qui diffère.
Alors que la Chine limite, en Asie orientale, cette coopération à l’ASEAN (+3 Chine, Japon, Corée du sud) tout en portant en parallèle, la construction de l’OCS (organisation de coopération de Shanghai qui, depuis 2001 regroupe la Russie, la Chine, le Kazakhstan, le Kirghizistan, le Tadjikistan et l’Ouzbékistan), le Japon cherche de son côté à élargir cette aire de coopération à l’Australie, la NZ, l’Inde, 3 pays démocratiques susceptibles de contrebalancer la domination chinoise.
- Des conflits géostratégiques
Enfin, des rivalités stratégiques s’expriment dans l’océan Pacifique où la Chine souhaite contrôler un vaste espace maritime, au sein duquel sa marine s’est donné pour objectif de pouvoir croiser à l’avenir.
Les 2 pays sont en désaccord en ce qui concerne la délimitation de leur ZEE respective en mer de Chine orientale.
Le Japon prône le principe de la ligne médiane, tandis que la Chine revendique la totalité du plateau continental. Ce litige maritime est compliqué par une dispute concernant la souveraineté d’un petit archipel: Senkaku en japonais, Diaoyu en chinois. Administré par le Japon (qui l’a annexé en même temps que Taïwan en 1895), il est revendiqué par la Chine qui estime que cet archipel aurait dû lui revenir après la 2°GM, et par Taipei.
Dans le jeu très complexe des alliances en Asie, le Japon et la Chine ne sont pas les seuls acteurs: pays émergents, la Russie «puissance déchue, redoutable à terme», sans oublier, à plus long terme sans doute, l’Inde, une «puissance mondiale potentielle» jouent un rôle croissant et affirment elles aussi des ambitions non seulement régionales mais aussi mondiales
I I – DES AMBITIONS MONDIALES
A°) Le Japon : devenir aussi une puissance politique:
- Un acteur incontournable de la mondialisation :
Malgré sa très forte croissance économique à partir des années 1950, c’est au cours des années 1980 que le Japon s’insère dans l’économie mondiale, dont il devient un des 3 pôles dominants.
L’insertion du Japon dans les économies régionale et mondiale se poursuit dans les années 1990-2000 avec la signature d’accords de libre-échange, une plus grande ouverture aux importations, et des délocalisations d’entreprises vers les pays d’Asie à main-d’œuvre bon marché.
Si le Japon a perdu sa place de 2° puissance économique mondiale en 2010 au profit de la Chine, il n’en reste pas moins un des acteurs majeurs de la mondialisation, en particulier grâce au dynamisme de ses firmes manufacturières. En 2009, 218 d’entre elles étaient classées parmi les 1000 plus grandes firmes manufacturières du monde, soit un peu moins que les EU (276) mais beaucoup plus que la France (48) qui arrive en 3° position.
Le Japon reste une grande puissance commerciale (4° en 2010), avec une part dans les échanges mondiaux de 5%.
- La quête d’une plus grande influence politique:
Candidat à un siège permanent à l’ONU depuis 1993, le Japon considère que sa position de puissance économique mondiale justifie le fait de lui accorder un poids plus important au Conseil de sécurité, organisation dont il est l’un des principaux financeurs. Il encourage, avec l’Allemagne, le Brésil et l’Inde, une réforme de l’ONU qui n’a pas encore abouti, notamment en raison des réticences chinoises.
D’importants débats ont également lieu autour de la constitution japonaise, rédigée après la 2°GM, qui affirme le renoncement du pays à la guerre et limite l’action de ses forces militaires à sa défense (FAD Forces d’autodéfense). Ce renoncement est désormais perçu comme un obstacle à une plus grande influence mondiale par certains hommes politiques qui réclament sa suppression.
Le Japon a longtemps peiné à s’affirmer géopolitiquement : par choix, il n’est pas une puissance nucléaire, mais il est devenu néanmoins une puissance militaire avec le 6ème budget militaire mondial. Il possède aujourd’hui. une capacité de déploiement importante, notamment grâce à sa marine, fortement renforcée.
Des lois ont été adoptées pour autoriser les FAD à participer à des opérations de maintien de la paix de l’ONU ou à des opérations humanitaires, en soutien de l’armée EU en Irak. La marine japonaise joue un rôle important à l’échelle régionale, dans la surveillance des lignes maritimes internationales et dans la lutte contre la piraterie.
- Puissance civile et «soft power»
Le Japon tente de contourner cette faible influence politique et militaire à l’échelle mondiale en jouant la carte de la puissance civile au service de la paix et de l’éradication de la grande pauvreté. Il contribue ainsi largement au financement des grandes institutions et banques internationales, comme la banque asiatique de développement (BAD) où son influence est déterminante.
Il offre également une importante aide publique au développement (APD). D’abord concentrée en Asie du Sud-Est et en Chine, pour laquelle le Japon a constitué la 1° source d’aides jusqu’au milieu des années 2000, l’APD s’est géographiquement élargie, principalement à destination de l’Afrique.
Les autorités japonaises cherchent aussi à populariser le Japon via la promotion de la langue japonaise, mais aussi du «cool Japan» terme utilisé pour désigner la culture de masse (jeux vidéos, mangas, J-pop…) qui s’est largement répandue dans le reste de l’Asie, en Europe occidentale (particulièrement en France) et en Amérique du Nord.
Le lancement en 2003 du programme «Yokoso Japan» (Bienvenue au Japon), qui vise à augmenter le nombre de touristes étrangers au Japon à hauteur de 30 millions en 2020, illustre également cette volonté de donner au pays une nouvelle image et de développer ainsi son soft power
B°) La Chine : devenir la 1ère puissance mondiale
- La 2°économie mondiale:
L’émergence économique de la Chine s’explique par l’adoption d’une politique graduelle d’insertion dans la mondialisation, basée essentiellement sur la promotion des exportations et l’attraction des IDE.
3 grandes étapes peuvent être distinguées:
– l’ouverture du littoral via la création de ZES dans les années 1980
– la généralisation de cette ouverture à l’ensemble du territoire chinois en 1992
– l’adhésion de la Chine à l’OMC en 2001
Cette dernière étape a définitivement propulsé la Chine comme principal pays atelier de la planète. La décennie 2000 a ainsi été marquée par une très forte croissance de la production manufacturière, des flux d’IDE et surtout du commerce extérieur, brièvement interrompue par la crise économique de 2009. En 2010, la Chine est devenue la 1° puissance industrielle et le 1° exportateur du monde.
L’intégration de la Chine à l’économie mondiale est également illustrée par la croissance récente et rapide des flux d’investissements chinois à l’étranger, dont la part dans le total des IDE mondiaux est désormais supérieure à celle du Japon et de certains pays européens.
Localisés dans les PVD comme dans les PID, ces investissements ne sont pas seulement concentrés dans le secteur des ressources naturelles ou de la construction d’infrastructures de transport, mais aussi et surtout dans les secteurs du commerce, des services et de la finance. Ils bénéficient d’un
soutien gouvernemental plus fort depuis quelques années.
- Une influence politique grandissante :
La Chine a accentué son rôle politique dans les grandes instances comme l’ONU ou le G20. A l’image du Japon, son implication dans les opérations de maintien de la paix est croissante, et elle a fait de l’aide au développement un volet incontournable de sa diplomatie à destination de l’Afrique, de l’Amérique latine et de l’Asie. Son rôle au sein de la Banque asiatique de développement dont elle est désormais le 2° contributeur, s’est fortement accru ces dernières années, annonçant une future concurrence avec le Japon.
Membre permanent du Conseil de Sécurité de l’ONU, la Chine bénéficie d’un incontestable avantage dans la diplomatie mondiale ; elle s’oppose fermement à la demande du Japon d’obtenir un siège permanent au conseil de sécurité de l’ONU.
Elle affirme aussi ses ambitions diplomatiques avec la création de l’OCS, Organisation de Coopération de Shanghai, en 2001 : elle concrétise ainsi un nouvel axe d’alliance avec la Russie. Notons aussi que l’Inde, le Pakistan ou encore l’Iran en sont membres observateurs… ce qui ne peut que susciter une inquiétude croissante des États-Unis.
Cette influence politique grandissante de la Chine à l’échelle mondiale pose la question de ses rapports avec les EU qui restent, au-delà d’une très forte interdépendance économique et financière, empreints d’une profonde rivalité stratégique. Elle perçoit les bases militaires EU en Asie comme «
un acte d’encerclement », les EU dénoncent deleur côté l’ambition chinoise de constituer un «collier de perles» sur le pourtour de l’océan Indien, points d’appui
qu’elle contrôle entre son territoire et le Moyen-Orient et l’Afrique lui permettant d’assurer sa sécurité énergétique.
Elle veut aussi consolider son influence en mer de Chine, d’où des tensions avec les pays riverains. La Chine aspire à retrouver sa puissance : elle dispose aujourd’hui du 2 ème budget militaire mondial, bien qu’encore loin derrière les EU et modernise son armée.
Elle investit environ un tiers de ses réserves en devises étrangères en bons du Trésor américains, ce qui fait d’elle le premier créancier des États-Unis, dont elle est par ailleurs l’un des principaux fournisseurs. Le dialogue entre les deux puissances est permanent, notamment dans les organisations internationales ou régionales comme l’APEC, mais la Chine s’oppose de plus en plus fréquemment et ouvertement aux États-Unis : «Pékin et Washington jouent à se faire peur » !
- Le pari de la puissance culturelle:
L’émergence de la Chine suscite partout un sentiment partagé. Son pouvoir d’attraction dans le monde en développement, où elle apparaît parfois comme un modèle, est manifeste.
En revanche, la stricte défense de ses intérêts nationaux, la modernisation de l’APL (Armée populaire de libération, armée régulière de la République populaire de Chine, totalisant 2,3 millions de soldats), dans un contexte de revendications territoriales permanentes sur Taïwan ou les îles des mers de Chine, ainsi que les positions très fermes du gouvernement sur les questions des droits de l’homme et au Tibet, tendent à lui donner une image négative, voire menaçante, en Asie et dans les démocraties occidentales.
Pour dissiper cette représentation, les autorités misent, depuis plusieurs années, sur la promotion de la langue et de la culture chinoises, notamment à travers le développement des instituts Confucius (330 en 2010). La Chine organise aussi de grandes manifestations culturelles internationales, où elle démontre son savoir-faire et sa puissance: cf les JO de Beijing en en 2008 et l’exposition universelle de Shanghai de 2010 (73 millions de visiteurs).
La Chine tente aussi de renforcer ses liens politiques, économiques et culturels avec la diaspora chinoise, qui n’est plus seulement perçue comme un simple investisseur utile à la modernisation économique du pays, mais aussi comme un éventuel relais à son influence et à la protection de ses intérêts à l’échelle mondiale.