Aux XVème et XVIème siècles l’Europe connaît de profondes et multiformes mutations. L’Italie, alors véritable centre de l’Europe, mais aussi la Flandre, amorcent un vaste courant de renouveau intellectuel, spirituel c’est ce que l’on, appelle l’humanisme. Parallèlement dans le domaine des arts un vaste mouvement de renouveau artistique s’opère, c’est ce que l’on appellera plus tard la Renaissance. Dès la fin du XVème siècle Humanisme et Renaissance gagnent une grande partie de l’Europe.
Ce foisonnement intellectuel s’opère dans un contexte mental encore marqué par les malheurs gigantesques qui ont frappé l’Europe au XIVème siècle et donc une angoisse profonde qui habite les hommes. Ces deux processus conjugués amènent les hommes à s’interroger sur leur rôle et leur place dans le monde et dans leur lien à Dieu.
Problématique : Comment les hommes de la Renaissance ont-ils affirmé la place nouvelle de l’homme dans cette période troublée et fondatrice de la modernité ?
I – Léonard de Vinci et l’affirmation de l’artiste total.
Né en 1452 à Vinci, près de Florence, Leonardo da Vinci est le fils illégitime d’un petit notaire. Il meurt en 1519 près d’Amboise, le château de François Ier, reconnu comme peintre, ingénieur et architecte. Il incarne aujourd’hui encore la figure du « génie » multiforme.
A °) Un esprit curieux de tout.
*Léonard de Vinci, comme bien des artistes de la Renaissance, ne se contente pas d’exceller dans un seul domaine, son apport et sa réflexion s’exercent dans les arts, comme les techniques et les sciences. Ses créations, ses croquis témoignent de son inventivité et de sa quête intellectuelle. Outre la création artistique, Léonard de Vinci amorce une démarche scientifique basée sur l’observation et l’expérimentation.
*Le XVIe siècle est un siècle où les lettrés (tout comme les découvreurs) vont chercher à comprendre le monde et à percer les mystères de la nature humaine. A cet égard Léonard de Vinci incarne « l’homme moderne » et s’inscrit parfaitement dans cette mouvance.
*Bravant les interdits religieux, sa soif de connaissances le conduit à disséquer le corps humain, tout comme les médecins Ambroise Paré (1509-1590) ou Vésale (1514-1564).
En cumulant les connaissances des anciens, Léonard de Vinci replace l’Homme au centre de toutes les préoccupations.
*L’homme de Vitruve (1490) illustre parfaitement ce concept tant au point de vue scientifique, avec la notion de proportionnalité, que philosophique puisqu’il ne s’agit pas de présenter un homme idéal ou idéalisé mais un modèle géométrique d’un homme normal. Cet homme normal devient le centre des préoccupations et de l’art.
B°) Le statut nouveau de l’artiste
Les différentes étapes de la vie de Léonard de Vinci illustrent l’ascension sociale et l’affirmation du statut de l’artiste.
A l’âge de 12 ans il est placé en apprentissage dans l’atelier d’un grand maître de la Renaissance florentine, A. Verrocchio. Il est ainsi au contact des différents corps de métier dont il apprend les techniques.
L’artiste de la Renaissance ne travaille alors que par commande. La renommée croissante et surtout l’ambition immense de Léonard l’amènent à se mettre au service des Princes susceptibles de lui garantir confort matériel et reconnaissance. C’est pourquoi en 1482 il se met au service du duc de Milan, l’un des hommes les plus puissants d’Italie.
Les relations entre Vinci et ses commanditaires sont souvent délicates. Il rend ses œuvres en retard, voire ne les achève pas ne se fiant qu’à sont jugement pour savoir si l’oeuvre est digne d’être exposée ou non. Contrairement à l’artisan, l’artiste prétend réaliser une œuvre originale dont la signature est l’affirmation. En 1516, il rejoint l’un des souverains les plus puissants d’Europe, François 1er, qui lui offre le titre de « …premier peintre et ingénieur et architecte du Roi,… ».
Léonard de Vinci meurt en 1519 auprès de François Ier dans le château d’Ambroise. Il a gagné sa place parmi les « grands hommes » dignes d’être étudiés, et figurer la première histoire de l’art est publiée en 1550.
C°) Un art reflet de la technique et des interrogations spirituelles
La réflexion scientifique et philosophique de da Vinci s’inscrit dans le courant humaniste. L’humanisme considère en effet que les capacités de l’homme sont infinies. Afin de développer ces capacités, l’homme doit maitriser différents savoirs (mathématique, géométrie, anatomie…) Ils prônent la vulgarisation des écrits religieux qui doivent être accessible à toute personne, quelles que soient ses origines ou sa langue.
Léonard de Vinci, par son parcours, illustre les dynamiques d’une société en mutation. Son Annonciation est le reflet d’une société qui a besoin de réconfort spirituel.
II – Face à l’angoisse des temps, une réponse spirituelle : Martin Luther et la Réforme protestante.
A°) Un contexte de crises spirituelles.
La chrétienté aux XIVème et XVème siècles connaît une angoisse profonde née d’un contexte éprouvant : la Peste noire au milieu du XIVème siècle (1347-1351) a tué entre le tiers et la moitié de la population européenne, la Guerre de Cent ans (1337-1453) a ravagé le royaume de France, la prise de Constantinople (1453) symbolise l’expansion de l’islam des Turcs seldjoukides. Cela instille le doute, une certaine culpabilité et une mauvaise conscience qui débouchent sur un fort pessimisme. Pour les populations européennes il semble que Dieu se soit détourné d’elles, c’est donc que par leur comportement elles ont failli, cela contribue à multiplier leurs interrogations.
Cette angoisse amène la population à rechercher de multiples intercesseurs afin de rendre Dieu moins « lointain ».
=> Développement des figures rassurantes et protectrices, la Vierge omniprésente dans les cultes comme les représentations, c’est le cas également de sa mère, Ste Anne.
=> La vénération des reliques des saints passait pour permettre d’obtenir des indulgences. (EXPLICATION VOCABULAIRE NECESSAIRE). Se développe alors l’une des dérives majeures de l’Eglise, l’idée qu’une transaction financière peut racheter les péchés, quitte à négliger la confession et la communion.
=> Des prédicateurs puissants aparaissent, comme Savonarole à Florence à la fin du XVème siècle
Frappé par la misère sociale et par les épidémies, le peuple perd progressivement la foi dans la parole de son prêcheur. Le pape, voyant s’amenuiser la popularité du prédicateur florentin, s’est finalement décidé à l’excommunier. Avec cette sanction, l’isolement de Florence atteint son comble, et le commerce en pâtit. C’en est trop pour de nombreux notables qui prennent leurs distances, désireux de stabilité pour mener à bien leurs affaires. Quant aux opposants, ils s’enhardissent progressivement jusqu’à prendre d’assaut le couvent de San Marco, en avril 1498, faisant plusieurs morts. Un mois plus tard, le 23 mai, hué par ces mêmes Florentins qui l’avaient acclamé, le prédicateur est pendu puis brûlé place de la Seigneurie, condamné à la fois par la justice florentine et celle du pape.
Les réponses classiques de l’Eglise catholique sont insuffisantes face à la question essentielle que se posent les populations : comment assurer son salut dans l’au-delà.
B°) Luther et la Réforme protestante.
Martin Luther est un moine allemand. Né en 1483 il est ordonné prêtre en 1507, puis il enseigne, poursuit ses recherches et prêche à Wittenberg (Saxe-Anhalt aujourd’hui). En cela il incarne un « type » d’homme de la Renaissance cherchant par la connaissance à atteindre le salut.
En 1517 il rédige et publie 95 thèses bases de sa Réforme. Il dénonce les indulgences et expose un élément central de sa doctrine : les actes des hommes ne peuvent influer sur leur salut éventuel, seule la foi sincère peut sauver. Ses thèses se diffusent rapidement dans le monde germanique grâce à l’imprimerie et les débats sont virulents entre partisans et opposants de celles-ci. Le pape, Léon X, prononce son excommunication, en janvier 1521.
La rupture est alors consommée entre Luther et l’Eglise catholique. En 1529 une nouvelle tentative de bannissement est prononcée contre Luther, cela entraîne la protestation de certains Princes et villes allemands, et institue le terme de protestantisme pour désigner les Eglises issues de la Réforme de Luther.
La dénonciation des pratiques catholiques : curé ignare, cérémonie coupée du peuple, sans référence aux textes, processions et extrême-onction inutiles.
Colère divine et châtiment purificateur.
Conclusion : insister sur la dimension propagandiste de l’œuvre mais aussi sur la connaissance des fondements du protestantisme qu’elle permet d’appréhender : la foi, la Bible, le sacerdoce universel et rejet du pape, religion plus personnelle : le « royaume de Dieu » est en chacun, non dans l’Eglise.
C°) Diversité et diffusion de la Réforme, une Europe déchirée.
Le succès de la Réforme protestante et l’impact des thèses de Luther sont très nettement liés au développement de l’imprimerie. Il traduit le Nouveau Testament en allemand, donc plus accessible, en 1522. Entre 1517 et 1520 plus de 300 000 exemplaires de ses écrits sont diffusés.
La Réforme déborde rapidement le monde germanique, dans les années 1520 la Scandinavie est atteinte, la première église réformée est ouverte à Paris. L’Angleterre en 1534 (schisme d’Henri VIII), puis l’Ecosse.
Cependant insistance sur l’individu, refus de la hiérarchie et affirmation du sacerdoce universel entraînent division du protestantisme en de multiples branches : les trois principales : luthérienne, calviniste (présente notamment en France, aux Provinces-Unies et en Suisse) et anglicane. La pluralité est la marque de la Réforme. Insister sur l’opposition Europe du Sud exclusivement catholique et Europe du Nord et Nord-ouest où protestantisme beaucoup plus implanté crée diversité.
La Réforme protestante entraîne la réaction de l’Eglise et des Princes et populations catholiques. Les tensions, conflits et affrontements entre catholiques et protestants sont violents. En France les idées de Luther et surtout de Calvin se diffusent largement. Les persécutions contre les protestants sont importantes Mais la violence confessionnelle change d’échelle en 1562, début de huit guerres de religion entre 1562 et 1598 :
Le symbole majeur est le massacre de la Saint Barthélémy, 24 août 1572, à l’occasion du mariage d’Henri de Navarre, futur Henri IV, et de Marguerite, fille de Catherine de Médicis. Au moins trente mille protestants furent alors massacrés dans l’ensemble du royaume.
L’Edit de tolérance de Nantes en 1598 permet de reconnaître, et d’encadrer, le protestantisme en France. C’est une avancée majeure en France car il reconnaît la liberté de culte, et donc de conscience, malgré des restrictions.
Conclusion : L’action de M. Luther a contribué à l’affirmation d’une foi chrétienne, plus autonome, parallèle à l’affirmation de l’individu entrainant la division religieuse de l’Europe.
Conclusion générale : les hommes de la Renaissance sont habités par des questionnements profonds, spirituels, philosophiques. Luther et Léonard de Vinci incarnent ces dimensions, leurs œuvres respectives sont parmi les plus significatives du tournant culturel, social et politique qui caractérise la Renaissance.